Colère : décès – double peine successorale

Quand l’État taxe l’absence d’enfant et le choix de la transmission

Les textes de la catégorie Colère, n’engage pas l’asbl mais seulement l’auteur.

Attention à lire les consignes avant de lire toute page d’un site santé !

Introduction : Du droit de vie à la condamnation fiscale

Le droit de choisir de ne pas avoir d’enfants est une liberté fondamentale, qui relève strictement de la sphère privée et ne devrait nécessiter aucune justification face à la pression sociétale. Pourtant, ce choix de vie est souvent confronté à une réalité fiscale particulièrement inéquitable : les droits de succession.

En favorisant massivement la transmission en ligne directe (parents à enfants), les systèmes fiscaux actuels exercent une discrimination indirecte envers les personnes sans enfant. L’État, par son régime fiscal, semble imposer un jugement financier a posteriori sur ce parcours de vie, transformant l’absence de descendance en un lourd fardeau pour les légataires.

Nous dénonçons ici la double peine qui en résulte : la taxation d’un capital déjà imposé tout au long de la vie du défunt, amplifiée par des taux punitifs uniquement parce que le lien de transmission n’est pas celui de la filiation privilégiée.

I. L’iniquité fiscale : Favoriser la lignée, pénaliser la liberté

A. Le mécanisme discriminatoire des droits de succession

Les systèmes fiscaux nationaux, notamment en Europe, sont construits sur un critère simple mais lourd de conséquences : le lien de parenté.

  • Ligne directe (parents-enfants) : Les taux sont les plus bas et les abattements (exonérations) sont souvent si importants que la majorité des successions de petite et moyenne taille ne sont pas taxées.
  • Ligne collatérale (frères, sœurs, neveux, nièces) ou Tiers : Les taux sont beaucoup plus élevés (pouvant atteindre voire dans certains pays ou régions pour les tiers) et les abattements sont très faibles, voire inexistants.

Pour la personne sans enfant, cela signifie que le fruit d’une vie de travail, déjà lourdement taxé à travers l’impôt sur le revenu, la TVA et autres prélèvements, sera inévitablement amputé à des taux considérables, qu’elle choisisse de léguer à un neveu, une nièce, un ami proche, ou une association.

B. L’État, héritier universel privilégié

La différence de traitement fiscal est perçue comme une confiscation étatique qui se justifie uniquement par l’absence d’une lignée animale génophilique privilégiée par la loi. La personne sans enfant est ainsi privée du droit de disposer pleinement de son patrimoine après son décès, ses légataires étant confrontés à des taux punitifs.

L’État se positionne alors, par défaut, comme l’héritier universel privilégié, récoltant un impôt massif non pas sur la base de la création de richesse ou de la solidarité collective, mais sur l’unique fait que le défunt n’a pas procréé.

II. L’argument moral et social : Contre la prime à la natalité successorale

A. La dénonciation d’une prime à la procréation archaïque

Quelle est la justification morale à taxer la transmission à entre une personne sans enfant et son légataire désigné (un proche, un ami qui s’est occupé d’elle, etc.), alors que la même somme serait presque exonérée entre un parent et son enfant ?

Ce système est le reliquat d’une pression sociétale et d’une influence historique (notamment religieuse, avec l’injonction à « croître et multiplier ») qui a longtemps élevé la procréation au rang de devoir. Les lois successorales perpétuent ainsi, par le biais de la fiscalité, une prime implicite à la natalité issue d’un modèle largement dépassé.

B. Le non-sens économique et le choix éthique

L’argument économique souvent avancé — « faire des enfants pour payer les pensions » — est une vision linéaire et court-termiste. La valeur d’un individu dans la société et sa contribution ne peuvent se résumer à son seul rôle de parent. La loi ne devrait pas compenser les déséquilibres démographiques en punissant le citoyen.

De plus, ne pas avoir d’enfants peut être un choix lucide et éthique, notamment en réponse aux défis de la surpopulation mondiale et de l’épuisement des ressources (un acte de « respect profond pour les limites de notre planète »). Il est paradoxal et inacceptable que l’État sanctionne financièrement ce citoyen responsable, qui agit potentiellement dans l’intérêt de la planète, en réduisant drastiquement la valeur de son legs.

C. La dévalorisation des liens choisis

Ce système ignore et dévalorise les liens sociaux et affectifs cruciaux (amitié, soutien, aide mutuelle) qui sont souvent les plus importants pour une personne sans descendance. En imposant des taux « tiers », la loi relègue ces liens à une catégorie de transaction purement commerciale, ignorant la réalité de l’affection et du soutien qui peut exister entre le défunt et ses légataires.

III. Les pistes de réforme : Vers une fiscalité successorale plus juste

Il est impératif de réformer les droits de succession pour qu’ils reconnaissent la pleine validité de tous les parcours de vie.

  1. Instaurer l’Égalité des Abattements : Mettre en place un abattement universel et conséquent (exonéré ou faiblement taxé) par légataire, quelle que soit la nature du lien. Le taux d’imposition ne dépendrait plus du degré de parenté, mais uniquement du montant transmis au-delà de cet abattement.
  2. Plafonner les Taux « Tiers » : Réduire les taux marginaux confiscatoires appliqués aux collatéraux éloignés et aux tiers (actuellement jusqu’à à ) à un maximum plus raisonnable (par exemple, ou ).
  3. Reconnaître les « Proches Désignés » : Permettre au défunt sans enfant de désigner, via un acte notarié spécifique, un ou deux légataires qui bénéficieraient, sous certaines conditions strictes (cohabitation de longue durée, relation d’aide mutuelle prouvée), des mêmes avantages fiscaux que la ligne directe.

Conclusion : Mettre fin à la discrimination post-mortem

Réformer la fiscalité successorale est un enjeu de justice sociale. L’État doit cesser de pénaliser le citoyen qui n’a pas eu d’enfants, que ce soit par choix ou par contrainte.

Le droit de disposer librement du fruit de son travail, même après sa mort, est un droit fondamental. En s’acharnant sur la transmission aux proches désignés par un citoyen sans descendance, les États ne font que renforcer une souffrance potentielle et trahir l’idéal de neutralité de l’autorité publique face aux choix de vie personnels.

F.Liégeois